Makery

Eniarof, les alters du joystick à ICI Montreuil et dans un livre

Sur «Flippaper», on dessine le parcours de la balle et on flippe. © Nicolas Barrial

Alors qu’Eniarof célèbre douze ans de fêtes foraines déviantes dans un«livre Frankenstein», ICI Montreuil accueillait une miniversion de l’événement néopunk.

A l’origine, en 2005, Eniarof (« foraine » à l’envers) était le projet de fin d’études d’Antonin Fourneau aux beaux-arts d’Aix-en-Provence. Il détournait, sur le mode du DiY, les jeux d’arcade, les attractions foraines et autres juke-box d’antan. Depuis, l’artiste designer avec la complicité de l’artiste Douglas Edric Stanley (son professeur à l’époque) a organisé une vingtaine de ces rendez-vous ludico-artistiques publics en France, en Allemagne comme à Moscou (on vous en parlait ici).

Faire et défaire l’attraction

Cette épopée créative qui privilégie le faire et l’étrangeté, sorte de freak show du jeu d’arcade, est retracée dans BookNIAROF, un livre façon livre de cuisine (des attractions et les recettes pour les reproduire). L’ouvrage qui vient de paraître était lancé les 12 et 13 mai au makerspace ICI Montreuil, avec pour l’occasion un mini-Eniarof. Retour en images.

«Slam the Arcade Age»

Par le collectif One Life Remains. Dans ce jeu de course à quatre joueurs, plutôt que d’utiliser les pouces, les participants écrasent les poings sur des manettes destructibles. On grimpe sur la table, on se bouscule, pour une console définitivement plus punk que la Wii.

«Tetris Adventure»

Par Florent Deloison. Preuve de la solidité de la communauté Eniarof, ce Tetris à commandes littérales (« droite », « tourne », « tombe »… à écrire en toutes lettres) a été conçu par Florent Deloison en 2010, alors qu’il était étudiant à Aix. Aujourd’hui artiste et professeur, il poursuit l’amélioration de ce concept qui met le feu aux neurones.

Les fautes de frappe, ça ne pardonne pas! © Nicolas Barrial

«RR»

Par Antonin Fourneau. Devant la scène vide, on pensait avoir loupé le concert. Les plus malins ont enfilé les perruques qui coiffaient les micros et se sont lancés dans un headbanging effréné (le rite capillaire des hard rockers, façon air guitar avec les cheveux) et la musique s’est mise à tonner et les spots à suivre le rythme. Bien joué.

«Motion Fiction»

Par Nathalie Guimbretière. Des dessins (membres, têtes d’animaux), un rétroprojecteur et trois boutons. Au début, on est comme une poule devant un couteau, puis on joue avec la disposition des éléments et on déclenche une prise de vue à chaque fois. Et c’est déjà parti pour la projection de notre œuvre. Magique.

«Gravity Scooter»

Par Alexandre et William Lejeune, Titouan Millet et Alexandre Vaugoux. Dans ce jeu poético-astronomique, deux joueurs s’affrontent dans l’espace pour mettre un projectile en orbite autour de planètes. Si le design naïf s’inspire de l’univers du Petit prince, un soin particulier a été apporté au respect des lois gravitationnelles.

«Cuicuibox»

Par Jankenpopp, Lord Ki-Itchi et Sober. Le concept est simple, c’est la plus petite boîte du monde, mais sans videur à l’entrée. On se presse comme des sardines dans le carton de quelques mètres carrés pour écouter un guitariste live. Les murs ont tremblé, à tel point que la Cuicuibox a fini détruite, le musicien jouant toujours sous les décombres.

«A battre»

Par Raphaël Isdant. Un Street Fighter et deux batteries. Chaque élément des batteries correspond à une commande. Si c’est un peu tempête sous un crâne pour sélectionner son personnage, le combat gagne beaucoup en intensité à coups de cymbale et de grosse caisse.

D’autres installations étaient également présentées à ICI Montreuil, dont Makery vous avait déjà parlé, dont Duke Make-up de Chloé Desmoineaux, un jeu de tir à la première personne à coups de rouge à lèvres, Shooting in the Rain de Manuel Braun et Antonin Fourneau, un ball-trap avec un parapluie en guise de fusil (que vous pouvez retrouver en Bricole it Yourself) et Flippaper de Jérémie Cortial et Roman Miletitch, un Flipper dont on dessine les obstacles.

Un «livre Frankenstein» pour fabriquer des jeux-monstres

L’objet de la rencontre, c’était la sortie de BookNIAROF, sous-titré « Guide de bricolage pour fabrication de fêtes foraines ». Si le livre restitue l’ambiance de la vingtaine d’Eniarof organisés depuis douze ans, avec toujours un système d’atelier de fabrication DiY en amont, il offre surtout des tutos pour fabriquer soi-même des OLNI (objets ludiques non identifiés). Comme l’explique Antonin Fourneau, « c’est une façon de casser le ghetto de l’art numérique en disant que oui la technologie, ça peut être un truc dans une cage en bois, et pas une station graphique boîte noire impénétrable ». Et d’ajouter : « Eniarof est un terrain vague. À ceux qui vont y venir de définir ce que l’on y met. » A vous de jouer !

Antonin Fourneau et Douglas E. Stanley présentent «BookNIAROF». © Nicolas Barrial

«BookNIAROF, guide de bricolage pour fabrication de fêtes foraines», d’Antonin Fourneau et Douglas Edric Stanley, mai 2017, 296pp., 19-80 Editions, 19€