Makery

Biohackers, à vos mallettes!

Le Bento lab, une mallette tout-en-un pour expérimenter la génétique et la biologie moléculaire DiY. © Bento lab

Biobidouilleurs, bio-artistes et communautés de la science ouverte miniaturisent leurs labs pour mettre le DiYbio à la portée de tous. Deuxième volet de notre sélection de valises, kits et mallettes.

Pour hacker de l’hormone ou sonifier de la bactérie, pas besoin d’équipements hors de prix ou de labos suréquipés. Dans l’esprit d’OpenPCR, un projet open source permettant d’extraire et d’amplifier l’ADN que l’on veut analyser, les communautés du DiYbio et de l’open science développent leurs propres boîtes, kits et valises pour faire du biohacking mobile et low cost. Deuxième épisode de notre série sur les mallettes des makers.

La mallette Bento lab

Le Bento lab, un minilab PCR open source. © DR

Le Bento lab est un minuscule laboratoire d’analyse génétique portatif et open source pas plus grand qu’une feuille A4. Il permet de sélectionner un échantillon biologique, d’en extraire l’ADN puis d’en faire une analyse de base. Les applications sont multiples, de l’identification des OGM aux tests d’intolérance au lactose en passant par l’analyse moléculaire de l’alimentation, histoire de savoir si son hamburger contient de la viande de cheval ou pas. La boîte combine plusieurs appareils courants utilisés en biologie moléculaire : une centrifugeuse pour extraire l’ADN d’un échantillon biologique (salive, follicule, etc.), un thermocycleur pour effectuer des copies de séquences et une unité pour visualiser l’ADN et interpréter les résultats.

Ses concepteurs, des scientifiques et des ingénieurs familiers du London Hackspace, ont fondé leur start-up, Bento bio, à la Makerversity de Londres. Ils tirent leur inspiration du projet OpenPCR, du réseau Hackteria et des trouvailles du concours international de biologie synthétique Igem. Commercialisé à 1 119€ (1 229$), le Bento lab est en précommande, mais il faudra patienter jusqu’en juin pour les premières livraisons. En bonus, la start-up propose également un kit de démarrage pour débutant à 189€ (209$) permettant d’apprendre les techniques de base et de faire ses premières expériences.

La démonstration vidéo (en anglais):

Le site du Bento lab

Le kit CRISPR Cas9

Le kit CRISPR d’origine commercialisé par The Odin. © DR

Certains biohackers ont un sens inné du business. Josiah Zayner, chercheur en biochimie passé par la Nasa et fondateur de The Odin (Open Discovery Institute), commercialise à tout-va ses kits DiYbio lorsqu’il n’est pas en pleine expérience de biohacking fécal. Parmi ses produits phares, un kit d’ingénierie génétique CRISPR Cas9 — une technique d’édition du génome — vendu 150$ (140€) sur son site.

Avec impertinence, des membres du réseau international de biohackers Hackteria ont décidé de le « pimper » pour y mettre une touche de fun. A l’occasion d’un workshop de l’Academie Schloss Solitude à Stuttgart en décembre 2016, ces artistes et biohackers en résidence ont détourné son kit pour rendre cette technologie futuriste « plus attractive ». Les résultats de ce détournement intitulé « Make you own CRISPR-kit » sont entièrement documentés sur le wiki d’Hackteria.

Des boîtes de Petri «pimpées» par Hackteria… © Hackteria
… et de nouveaux organismes génétiquement modifiés. © Hackteria

Le site du wiki d’Hackteria

La valise Energy bending lab

L’Energy bending lab, une mallette pour bio-sonifier les échanges bactériens. © Interspecifics

Interspecifics, collectif mexicain qui sillonne la planète de biohacklabs en festivals (nous les avions rencontrés à la Transmediale de Berlin), a fait de la communication interespèces son terrain de jeu fétiche. Ils ont imaginé l’Energy bending lab, un instrument qui sonifie les micro-organismes en temps réel. Bref, qui fait chanter les bactéries. La mallette se compose d’un synthétiseur modulaire customisé et d’outils de traitement de signaux qui amplifient et sonorisent le microvoltage produit par les organismes.

« L’Energy bending lab a été conçu comme un système interespèces DiY, expliquent Paloma López et Leslie García du collectif Interspecifics. L’objet explore la relation entre les formes d’ondes et la matière, en recherchant une compréhension à partir des motifs contextuels qui peuvent illustrer l’ordre sous-jacent de l’univers lui-même et de la conscience humaine, un ordre qui apparaît intimement lié à la vibration. »

Performance de Leslie García et Paloma López enregistrée avec l’Energy bending lab:

Le site d’Interspecifics

La valise Estrofem lab

La table de travail «Open Source Estrogen» lors d’Interactivos?’16 au Medialab-Prado. © Makery

Avec leur projet Open Source Estrogen, Byron Rich et Mary Maggic (alias Mary Tsang, réalisatrice de la série documentaire Diysect) développent une analyse critique de l’influence des œstrogènes et des perturbateurs endocriniens sur nos corps et notre environnement. Et pour la partager avec le public, ils ont créé l’Estrofem lab.

Ce hacklab de l’œstrogène itinérant tient dans une valise. Il se compose d’un ensemble d’outils DiY et de protocoles pour hacker de l’hormone en toutes circonstances et se poser de bonnes questions : comme peut-on fabriquer ses hormones soi-même pour la contraception ? comment détecter la présence d’hormones dans l’environnement ? comment concevoir des capteurs qui joueraient un rôle dans l’analyse citoyenne des eaux locales ? ou encore peut-on éliminer la toxicité hormonale de l’environnement ? Pour y répondre, le duo pose régulièrement ses valises lors de manifestations citoyennes, artistiques ou DiYbio, de la conférence Isea Hong-Kong au festival Art Meets Radical Openess à Vienne en passant par Interactivos? au Medialab-Prado en juin dernier à Madrid (Makery y était).

«Open Source Estrogen» lors d’Interactivos? au Medialab-Prado en juin 2016:

Le site d’Estrofem lab

Retrouvez le premier volet de notre sélection de mallettes pour makers