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Au Restart Project, on veut réparer les grille-pain jusque dans les écoles

Les ordinateurs font partie des appareils les plus réparés par le Restart Project. © Elsa Ferreira

Le Restart Project propose plusieurs rendez-vous par semaine à Londres depuis 2012 pour réparer ensemble les objets plutôt que les jeter. Désormais, c’est à l’école que le réseau veut agir. Reportage à Camden.

Londres, de notre correspondante (texte et photos)

Toujours les mêmes qui claquent les premiers : les grille-pain. Mais on voit aussi passer des ordinateurs fatigués, des ampoules de guirlandes de Noël qui ne clignotent plus ou des Ipad et leurs écrans trop bien collés. Ce 27 février, dans le nord de Camden à Londres, dans un centre social, les malheureux propriétaires d’appareils électroniques hors-service se sont donné rendez-vous pour leur offrir une seconde vie.

Une vingtaine de personnes sont attablées. Stefania Fantini, volontaire du Restart Project et ingénieure du son, aide Naomi Peck à tester une à une les ampoules d’une guirlande, sous l’œil attentif de David Jeffrey, Écossais fraîchement revenu des Etats-Unis. Il envisage lui aussi de donner de son temps : « J’étais volontaire à Fixit Clinic en Californie, dit-il. J’aimerais continuer ici. »

Sur le modèle des Repair Café, les Restarters se donnent rendez-vous pour réparer. 

Un peu plus loin, le combat est plus acharné. Faraz Sayed, maker que l’on avait croisé dans le collectif Opto Noise, se bat pour décoller l’écran brisé d’un Ipad. Peine perdue. Il redirigera finalement sa propriétaire vers un réparateur professionnel connu du réseau.

Faraz Sayed chauffe la colle pour tenter de décoller l’écran d’un Ipad. 

Un réseau branché écologie

Cela fait désormais cinq ans que les électroniciens du dimanche se réunissent plusieurs fois par semaine pour mettre leurs compétences au service de tous. Un peu comme le réseau Repair Café, né en 2009 à Amsterdam et qui fait carton plein à travers le monde, Restart Project réunit des amateurs, souvent à la conscience écologique développée. D’ailleurs, beaucoup des participants d’aujourd’hui ont entendu parler de l’initiative grâce à London Transition, un réseau qui vise à mettre en lumière les initiatives locales dans les domaines de l’écologie, la santé, la résilience ou tout autre alternative durable.

Financé par les donations de fondations privées et la vente de services aux collectivités locales et aux entreprises, le Restart Project, très actif, s’étend dans toute la capitale. Plusieurs réunions sont organisées chaque semaine dans des lieux différents. Certaines branches, comme Hackney Fixers, dans l’est de Londres, ont émergé du mouvement. « On a fait un manuel, le Restart Party Kit, qui explique comment gérer un de ces événements », explique Ugo Vallauri, cofondateur du réseau avec Janet Gunter. Aujourd’hui, non content de s’étendre d’est en ouest de Londres, le Restart Project soutient aussi des projets en Espagne, au Canada, en Norvège…

Partisan du mouvement des villes en transition, Ugo Vallauri a cofondé le Restart Project. 

Ici, on ne fait que dans l’électrique et l’électronique. « On met aussi l’accent sur l’apprentissage collaboratif et par le faire », explique Ugo Vallauri. Ainsi, les volontaires ne sont pas nécessairement des pros mais ils apprennent au contact des autres. Ils ont aussi des journées de « partage de compétences » où ils enseignent ce qu’ils savent faire aux autres, comme un cours de soudure. Sur leur Wikipédia, ils donnent des conseils pour résoudre les problèmes les plus récurrents : comment réparer un ordinateur trop lent ou connaître les bases d’un circuit électrique.

Au-delà de la pratique, les deux fondateurs collectent les données. Chaque soir, ils consignent quels appareils ont été apportés et s’ils ont pu être réparés. Depuis cinq ans, ils ont ainsi récolté les données de plus de 3 000 appareils. Ceux que l’on retrouve le plus sont les ordinateurs et les radios digitales, détaille Ugo Vallauri. En tout, les volontaires réparent environ 50% des objets apportés.

« Le but pour nous est de créer un standard de données ouvertes pour promouvoir plus d’informations sur la réparabilité des produits et un meilleur design dans le futur. Nous venons de la perspective du maker. Que pouvons-nous faire au-delà de la simple réparation ? Comment pouvons-nous ne pas simplement réagir passivement mais aussi agir positivement ? »

Atelier réparation au Parlement

En novembre 2016, une équipe de Restart Project s’est rendue au Parlement britannique pour bricoler avec cinq députés et leurs assistants, deux mois après que la Suède a voté une loi pour baisser la TVA sur la réparation. « C’était intéressant de réparer avec eux, estime Ugo Vallauri, et de voir qu’ils n’ont pas tellement conscience que les décisions sur la durabilité des produits et leur design ne dépendent pas seulement de décisions nationales mais qu’elles sont aussi européennes, et ce, même si le Royaume-Uni quitte l’Union. »

Désormais, c’est dans l’éducation que le réseau souhaite agir. Janet Gunter, cofondatrice du projet, vient d’entamer une session avec une dizaine d’élèves dans une école londonienne pour faire de la réparation dans le cadre d’activités extra-scolaires et discuter plus largement de matériaux rares, de déchets électroniques et d’impact pour la planète. Les sessions seront documentées et, espèrent les fondateurs, répétées. « C’est un pilote et nous cherchons à savoir ce qui pourrait être adapté à plus grande échelle. »

En savoir plus sur le Restart Project, via leur blog et le calendrier des prochains rendez-vous