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L’éducation pour modèle économique au fablab de Planète Sciences

Une armada de bénévoles de l'association Planète Sciences assistait à l'inauguration du Plascilab à Ris-Orangis. © Nicolas Barrial

Y a-t-il une recette pour ouvrir un fablab? Le Plascilab, inauguré le 13 février à Ris-Orangis, est porté par l’association Planète Sciences, forte de plus de 50 ans de promotion de la culture scientifique. Malgré des parrains prestigieux et un budget de démarrage de 80 000€, l’expérience reste un pari. 

Le samedi 13 février, l’association Planète Sciences inaugurait son premier fablab, le Plascilab, dans l’éco-quartier des Docks de Ris-Orangis (Essonne). Un évènement pour cette association spécialisée depuis 1962 dans la promotion des sciences auprès de la jeunesse. Avec ses 1 000 bénévoles et 80 permanents, l’association et son réseau national privilégient l’expérience dans la science, comme dans les moyens offerts par le numérique. « On met nos jeunes au cœur des projets, avec tout le cheminement pour passer de la 2D à la 3D, explique la directrice Sophie Guiraudon. Nous privilégions également des projets longs et en groupe, avec des écoles primaires, des collèges ou des lycées. »

Du fablab nomade au Plascilab 

Une profession de foi dans laquelle le Plascilab, un fablab de 300 m2, lumineux et bien équipé, parrainé par l’astrophysicien Roland Lehoucq, paraît avoir toute sa place. Le format fablab fait déjà partie de la culture de l’association qui déploie des fablabs nomades sous forme de mallettes pédagogiques lors de ses interventions en classe. Mais l’ouverture d’un fablab en dur implique bien d’autres considérations, notamment financières. Faire vivre un lieu dépasse la simple bonne volonté comme le montre le contre-exemple de l’Atelier de Bauvais, fermé un an seulement après son ouverture.

Le fabmanager Olivier Dalechamps, le responsable robotique de Planète Sciences Benoît Henry et la directrice de l’asso Sophie Guiraudon étaient présents à l’inauguration du Plascilab. © Nicolas Barrial

«Premier Fablab éducatif et expérimental du Sud francilien»

Planète Sciences a prévu de s’appuyer sur son réseau déjà établi au sein de lycées et collèges dans l’Essonne, le département d’implantation historique de l’association. Le Plascilab accueillera des programmes éducatifs et formera des éducateurs au numérique. « Ce prototype sera éventuellement diffusé à l’échelle du réseau national de Planète Sciences », défend Sophie Guiraudon.

En gestation depuis deux ans, le Plascilab ne sort pas de nulle part. Un espace de fabrication était déjà ouvert au public le week-end à Ris. Côté financement, la ville soutenait déjà l’association, elle soutient aussi le fablab. De même, la région Ile-de-France a choisi en 2014 le Plascilab dans le cadre de l’appel à projets Espaces de travail collaboratif et l’Etat participe via plusieurs guichets (réserve parlementaire, ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports et ministère de la Culture). 

Les imprimantes 3D et les postes informatiques équipés de bras robotiques au Plascilab. © Nicolas Barrial

Visibilité «proche de zéro»

A ces soutiens publics sont venus s’ajouter des partenaires privés : Safran, avec qui l’association organise déjà le Rocketry Challenge (un concours de fusées dans l’Education nationale) et RS France, distributeur de composants électroniques, partenaire ancien de la Coupe de France robotique, qui a offert 10 000€ de matériel. « Sur deux ans, l’ensemble de nos soutiens avoisine les 80 000€ », selon Sophie Guiraudon. Cependant, « en terme de visibilité, on est proche de zéro », reconnaît-elle. Mais « aucun fablab n’a de modèle garanti », défend-elle. 

Alors, pour durer, « on retourne chercher de l’argent auprès du Conseil général pour financer le volet animateur ». Des partenariats privés sont également à l’étude. Et Planète Sciences essaime la bonne parole auprès des acteurs éducatifs : « Nous allons continuer à faire des sciences nomades, en allant dans les collèges avec dans nos mallettes des imprimantes 3D. Le but est de revenir ici pour finir les projets. »  

Si la jeunesse présente à l’inauguration se pressait autour des imprimantes 3D ou devant la volière pour drones, le fablab accueille également des machines-outils conventionnelles, justement offertes par une entreprise. Le fabmanager Olivier Dalechamps tout comme le responsable de l’atelier « méca » Jean-François Rocchini, également professeur à l’école Simplon, se félicitent de cette prise, en soulignant que le tout numérique a empiété sur la formation à ce type d’équipements. Pour des raisons de sécurité, un permis sera délivré au terme d’une formation payante. « C’était un savoir que l’on venait déjà chercher auprès de l’association », explique Sophie Guiraudon qui rappelle que « ce matériel n’est pas commun dans un fablab ».

Ces machines-outils ont déjà servi à usiner des pièces robotiques. © Nicolas Barrial

La présence de ces machines rappelle les origines de l’association qui doit son développement au Centre national d’études spatiales (CNES). Dans les années soixante, « avec la conquête spatiale, les jeunes commençaient à faire des fusées avec de la poudre dans leur jardin », rappelle Sophie Guiraudon. Le CNES avait missionné Planète Sciences pour encadrer la vulgarisation de la culture spatiale et notamment la fabrication de fusées. D’ailleurs, se souvient Olivier Dalechamps, lui aussi a commencé à bidouiller depuis un garage la tête dans les étoiles. Alors, dit-il en plaisantant à moitié, « si ça ne marche pas, on retournera dans le garage ».

Les fusées du Rocketry Challenge au Plascilab. © Nicolas Barrial

A l’inauguration, une armada de bénévoles en T-shirts rouges, étudiants, passionnés de sciences, préfiguraient la fréquentation prochaine du Plascilab. Le nombre d’abonnés tout comme l’occupation des machines à l’heure permettront de dire si le succès est au rendez-vous. En attendant, un autre fablab Planète Sciences pourrait voir le jour en « juin ou septembre » en Midi-Pyrénées, à côté de Toulouse, selon la directrice de l’association.