Mathieu Geiler et Etienne Moreau ont achevé leur tour des labs en France et à l’étranger. Ils reviennent pour Makery sur les étapes européennes du MakerTour, de Berlin à Amsterdam en passant par Londres et Turin. A la recherche de l’esprit des labs.
Après cinq mois d’exploration en France et plus de quarante fablabs et ateliers visités, l’expédition MakerTour a fait naître chez nous de nombreuses questions qui nous brûlaient les lèvres alors que nous sortions des frontières hexagonales : comment nos voisins se sont-ils emparés des fablabs ; que pouvons-nous apprendre d’eux… et inversement ? Pas question (pour l’instant) de recréer une expérience aussi approfondie qu’en France mais plutôt d’avoir un aperçu des fablabs européens et de confronter nos intuitions et celles de la communauté au terrain européen. En route vers Berlin, Amsterdam, Londres et Turin !
Le Fablab Berlin, entreprise prospère et fablab ouvert
La première étape donna le ton pour la suite de cette exploration européenne. Se décrivant comme un « studio ouvert de fabrication numérique », le Fablab Berlin est en fait une… entreprise privée… de 23 personnes… créée en 2013 ! Une configuration que nous n’avions jamais observée jusque-là. Les trois amis cofondateurs se sont fixés une mission ambitieuse : développer en un seul et même lieu une agence de service prospère ET un fablab respectant la charte de la Fabfoundation. Impossible, diront certains. Le modèle de ce subtil mariage pourtant étonnamment résilient devrait en inspirer plus d’un.
Deux pistes répondent au succès du modèle berlinois : un partenariat avec le fabricant de prothèses et appareillages orthopédiques Ottobock, basé sur des bénéfices réciproques et la non-ingérence mutuelle, et le logiciel Easylab, la version allemande de Fabmanager, connecté à toutes les machines du fablab et qui permet de gérer facilement l’atelier au quotidien. Bientôt dans vos labs ?
Le Fablab Amsterdam, le fief des créateurs au bord de l’eau
Issu de la Waag Society, le Fablab Amsterdam, né en 2008, n’était alors que le troisième en Europe. Ce « makerspace pour l’innovation sociale et l’artisanat » est logé au sein de ce centre historique des nouveaux médias qu’est la Waag Society. Particularité ? Il occupe un château ancestral au cœur de la ville qui lui donne un charme unique.
Si Amsterdam est connue pour être une ville de créateurs, son fablab en est un carrefour ouvert à tous. Fabrication digitale, biologie, menuiserie, textile, ateliers dédiés au grand public, aux enfants ou aux professeurs, il fait intégralement partie de la culture néerlandaise. Au-delà du lieu, Amsterdam a d’ailleurs rejoint depuis quelques jours le réseau Fabcity des villes qui veulent « produire localement et être connectées mondialement ».
Le Fablab London, entreprise sociale au cœur de la City
Troisième arrêt en Grande-Bretagne au Fablab London, créé en 2014, dont la particularité est d’être situé en plein cœur de la City, le quartier des affaires de la capitale britannique. Deux amis et entrepreneurs aguerris ont en effet choisi cet environnement atypique pour créer un fablab qui a la Bank of China pour voisin. Au-delà de la prospérité économique, Andrew Gregson et Tony Fish veulent développer des technologies dans des contextes sociaux et faire de ce lieu celui de tous les possibles.
De leur aveu, l’exploitation d’un fablab n’est pas une activité lucrative, puisque trop « intense en services ». Il s’agit plutôt d’une infrastructure, une porte et une rampe de lancement pour les individus, les projets et le développement de services. Pas une fin en soi donc, mais plutôt un outil.
Le Fablab Torino, terreau fertile pour les makers
Premier fablab italien, le Fablab Torino, né en 2012, entretient une relation unique avec Officine Arduino, le centre italien de la firme éponyme. Partageant hommes et machines, les deux structures cohabitent au sein de l’immense bâtiment de Toolbox Coworking.
Au-dessus de l’atelier, ils développent ensemble le projet Casa Jasmina, un appartement open source sous la curation du célèbre Bruce Sterling. A ce jour, l’Italie, qui compte autant de fablabs que la France selon la plateforme Fablabs.io, possède un réseau national dénommé Make in Italy Foundation et propulse chaque année la plus grande Maker Faire du Continent à Rome.
Vers d’autres explorations européennes?
Premières intuitions confirmées : la communauté française n’a pas l’apanage de la diversité concernant les fablabs et makerspaces ; elle aurait tout intérêt à se connecter à d’autres initiatives européennes. Ces lieux étant hyper-contextuels et révélateurs d’une culture, chacun développe sa propre approche, ses pratiques singulières et son modèle à explorer, documenter et partager. De bon augure pour de futures expéditions de l’association MakerTour? Réponse(s) dans notre prochaine chronique depuis le cercle polaire et la Fabcity barcelonaise 😉
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