Makery

Covid-19 : En Bretagne, la production d’équipements DIY est coordonnée et validée par des spécialistes en impression 3D de dispositifs médicaux

Dans les locaux de l'entreprise SLS, spécialisée en impression 3D de dispositifs médicaux. © SLS-France

L’agence Bretagne Développement Innovation a mis en place dès début mars une plateforme de mise en relation des professionnels de santé et des entreprises bretonnes, via un système simple d’offres et de demandes. Le réseau des acteurs de la 3D et plus largement des makers, est particulièrement sollicité. Pour coordonner les intervenants, l’entreprise SLS France, spécialisée depuis 5 ans dans l’impression 3D de dispositifs médicaux, met à disposition son expertise de la chaine de production. Nous avons posé quelques questions à son fondateur Axel Dubois.

Initié par l’entreprise SLS France spécialisée dans le développement de dispositifs médicaux avec l’appui du Rehab Lab du centre de rééducation Kerpape de Ploemeur, et l’ensemble des fablabs bretons, la plateforme coordonne depuis début avril toutes les entreprises, fablabs et autres experts en matériaux et impression 3D présents en Bretagne.

Comme précisé sur le site internet, le réseau « propose de produire par impression 3D des produits de substitution sous réserve d’échanges étroits et de co-validation avec les professionnels de santé pour leur développement, selon des bonnes pratiques adaptées aux usages, pour répondre aux besoins urgents non pourvus uniquement en l’absence de produits homologués en stocks et quand la production de ceux-ci n’est pas possible. » Il peut ainsi coordonner la chaîne recherche-prototypage-validation-production-logistique.

Makery : Comment se passe la mise en relation des offres et des demandes ?

Axel Dubois : La Région s’est vite rendue compte qu’il y avait besoin de proposer des solutions de remplacement à des dispositifs médicaux, qui à la base n’en sont pas. Le monde des makers a vite été repéré comme fournisseur potentiel de solutions locales. Parallèlement, j’ai été très vite sollicité par les hôpitaux, avec qui je suis en relation habituellement, puisque notre métier de base est de fabriquer des dispositifs médicaux.

Avec la Région, nous avons décidé de coordonner cet ensemble via une plateforme. Très rapidement, il s’est avéré essentiel que les labs soient présents dans cette organisation, parce qu’aujourd’hui ce sont eux qui permettent d’avoir le niveau d’information et le niveau de granulométrie exacts sur les besoins locaux. Concrètement, il y a toujours au sein d’un hôpital une infirmière dont le mari est maker, qui cherchera à aider dans son coin. Mais si on n’a pas une vision d’ensemble, on risque de se retrouver localement avec des manques de matériel, faute d’action coordonnée, alors qu’on pouvait mettre en place un processus industriel de manière à fournir beaucoup plus d’équipements.

Schéma de proposition d’une offre d’impression 3D

Comment avez-vous défini le processus de coopération ?

On a défini le processus suivant : quand vous n’avez pas de matériel dans le territoire , soit vous avez tout ce qu’il faut en open-source, comme c’est le cas par exemple pour les pousse-seringues ou les visières ; soit vous avez besoin de dispositifs plus complexes, par exemple qui nécessitent l’assemblage d’une dizaine de pièces, et peut-être que dans ces dix pièces, vous en aurez une qui devra nécessairement être certifiée. Pour tout dispositif, nous devons tous nous mettre en ordre de bataille pour mettre en place très rapidement des processus d’industrialisation, et anticiper au maximum sur les futurs besoins.

Les fablabs sont de très bons systèmes pour répondre dans l’urgence. En revanche, il y a un problème de capacité de production, en cas de forte augmentation de besoin. C’est là que nous intervenons : 1/ Pour définir le besoin, définir un volume. 2/  Trouver la solution potentiellement industrialisable : quelle technologie sera préconisée pour la fabrication. 3/ Garantir un process de fabrication et de distribution sécurisant pour les soignants, sur les aspects assemblage, nettoyage et décontamination, emballage, distribution…

Il faut de 2 à 4 ans pour certifier un dispositif médical, en temps normal. Aujourd’hui, notre expérience et nos matériels nous permettent de mettre en place un processus d’urgence stable, tant au niveau mécanique que biologique.

SLS dispose entre autres de 5 imprimantes 3D métal et d’une salle de décontamination. © SLS-France

Comment analysez-vous la situation actuellement ?

Je crois qu’il se passe quelque chose d’important en ce moment : tout le monde est en train de se mélanger, de créer des nouvelles solidarités et de nouvelles manières de faire. De nouveaux liens se créent. Les gens vont s’en souvenir. La créativité qui est à l’œuvre aujourd’hui sera à l’origine de nouvelles dynamiques de fabrication et de distribution. Même si les institutions sont encore peu concernées, il est essentiel qu’elles s’en rendent compte et qu’elles soutiennent le mouvement : les labs, les makers, les TPE-PME qui sont aujourd’hui en première ligne.

La plateforme Covid-19 – Entreprises unies en Bretagne et sa page dédiée à l’impression 3D.

Le site internet de SLS-France.