Makery

Apprendre avec LIA à faire dévier les imprimantes 3D

Extrusion par le haut, une impression 3D réalisée pendant le workshop de LIA par Luc Hanneuse. © Luc Hanneuse

Vous pensiez tout savoir des imprimantes 3D à filament? Quand la pionnière autrichienne du net-art LIA mène un workshop sur le sujet, rien ne se passe pourtant comme prévu. Compte-rendu par Luc Hanneuse, fabmanager du centre d’art numérique belge Imal, pour Makery.

Du 18 au 21 novembre 2016, au centre d’art numérique et fablab bruxellois Imal, la célèbre artiste autrichienne LIA, pionnière de l’art logiciel et du net-art, animait un workshop sur le comportement spécifique des imprimantes 3D à filament, transposant dans le domaine tangible son travail expressif basé sur la programmation.

Le workshop permet de découvrir un autre usage de l’imprimante 3D. © Luc Hanneuse

LIA utilise les imprimantes 3D et leur fonctionnement de base : une tête d’extrusion se déplaçant dans les 3 dimensions sculpte et tisse des objets en déposant une matière encore souple ou presque solide. En contrôlant directement les mouvements de l’imprimante, elle étudie tous les aspects de la matérialité de ce processus, et génère, par le code, de nouvelles formes de sculptures.

«Filament Sculptures» (2013), LIA:

LIA explique : « Comme pour mes approches artistiques précédentes, j’ai préféré détourner l’utilisation première de l’imprimante 3D que mon mari m’a offerte et ne pas imprimer un modèle réalisé dans un logiciel de CAD. Je m’intéresse plutôt à son fonctionnement : le langage machine qui commande les mouvements et l’impression via le G-Code. »

Impression 3D sans modèle pendant le workshop de LIA (vidéo Luc Hanneuse):

Le workshop a attiré une dizaine de participants aux profils artistiques, de plusieurs nationalités. LIA l’a animé en proposant de suivre sa propre progression d’apprentissage/de découverte. Dans un premier temps, les participants ont essayé d’envoyer commande par commande le G-Code aux imprimantes. Après une série d’essais/erreurs, les participants sont arrivés à créer des blobs (des agglomérations de plastique) et des lignes, en déplaçant la tête d’une coordonnée à une autre.

Une création de Julien Leresteux pendant le workshop. © Luc Hanneuse
Impression 3D «à la LIA» réalisée par Yvonne Lake. © Luc Hanneuse
Le fabmanager de l’Imal a aussi contribué! © Luc Hanneuse

L’intérêt de ces techniques est que l’on peut travailler autrement que couche par couche : on peut créer un blob et étirer le filament vers le haut, puis recommencer. Cette technique est impossible avec l’approche traditionnelle, qui passe par un logiciel de type Slicer, qui va découper le modèle tranche par tranche en incrémentant la hauteur. Les découvertes sont nombreuses. En extrudant en hauteur, sans toucher le plateau, le filament tombe en créant un mouvement. Le filament refroidit et se durcit. Cette accumulation de filament tombé et solidifié donne des formes ou une texture plus organiques, plus aléatoires.

L’extrusion en hauteur, démo (vidéo Luc Hanneuse):

La génération algorithmique

Après ces essais en envoyant le G-Code ligne par ligne, LIA introduit le langage Processing, pour automatiser cette approche manuelle du ligne par ligne. Avec cette démarche, Processing aide à générer le texte du G-Code. Soit en répétant des séquences, soit en générant des coordonnées à l’aide de formules mathématiques basiques : ligne, cercle…

L’imperfection fait partie du projet. Réalisation Bob Wigetman. © Luc Hanneuse 
Un  mandala? Un napperon? Non, une impression 3D de Phillipe Elipeo. © Luc Hanneuse

La programmation vient à la rescousse : créer des fonctions, faire des opérations sur des variables, travailler avec des boucles, jouer avec des conditions… Le résultat des impressions devient alors plus complexe, plus abouti.

LIA incite les participants à suivre sa démarche, inspirée de la démarche scientifique : créer un algorithme, lancer l’impression, puis recommencer en changeant un paramètre à la fois. Elle n’hésite pas à partager ses découvertes, aide les participants à coder des parties de leurs projets. Et tous d’innover et d’enrichir la démarche, chacun s’appropriant la technique.

Voir la documentation du workshop «A computational and behavioural approach to 3D printing» de LIA et la page Facebook du fablab de l’Imal

Luc Hanneuse, coordinateur du programme Castii (Center for Arts, Sciences, Technologies, Innovations and Inclusion) est fabmanager de FabLab.iMAL