Makery

Soundcamp à Marseille, 24 heures d’écoute du monde

Ecoute d’enregistrements ornithologiques en vinyle proposé par Damien Sorrentino.

La sixième édition du Soundcamp a eu lieu les 4 et 5 mai. L’objectif: camper et écouter pendant 24h les chœurs d’oiseaux qui accompagnent les levers de Soleil à travers le monde. L’association deletere et Locus Sonus ont organisé le campement marseillais au Couvent du Levat.

Marseille, correspondance (texte et photos).

Chaque année depuis 2014, à l’occasion de la journée internationale du chœur de l’aube, ou International Dawn Chorus Day, les artistes Grant Smith, Maria Papadomalolaki et Dawn Scarfe du collectif Soundcamp accueillent des contributions autour du projet Réveil : une émission radiophonique de 24 heures qui suit en temps réel l’aube et le chœur d’oiseaux qui l’accompagne autour du monde. Et chaque année cet événement donne naissance à des campements temporaires, des Soundcamp, proposant des expériences sonores issues de flux de streaming.

Ce week-end du 4 et 5 mai 2019, les streamers volontaires à travers le monde ont été invités à placer des microphones ouverts sur la carte sonore de Locus Sonus en utilisant un téléphone, un ordinateur portable, un Raspberry Pi ou tout autre moyen. Chaque flux a contribué à enrichir l’émission de radio et les propositions artistiques des différents camps.

La Soundmap de Locus Sonus.

Le campement principal se situe au sein du parc écologique de Stave Hill à Londres, QG du collectif, mais d’autres fleurissent chaque année à travers le monde, de l’Australie au Chili, du Japon à l’Equateur, en passant par la Slovénie et la Grande Bretagne. Et ce week-end, nous avons eu la chance de pouvoir participer au premier Soundcamp organisé à Marseille par l’association deletere et le laboratoire Locus Sonus (ESA-Aix, AMU, CNRS, PRISM) dans les jardins du Couvent du Levat. Pendant 24 h, ce sont succédé moments d’écoutes, performances sonores improvisées, balades sonores et discussions.

Samedi matin, installation du campement au Couvent Levat, avant l’arrivée des participants. Quelques tentes et surtout le dispositif technique. Au loin, un corps de bâtiment du couvent.
L’artiste Grégoire Lauvin et Peter Sinclair, coordinateur de Locus Sonus, en pleine discussion technique sur les flux de streaming.

Participer au Soundcamp

Factuellement, participer au Soundcamp du Couvent, ou d’un autre site, c’est : s’inscrire, venir avec son matériel de camping, s’installer et profiter des propositions sonores. La soirée est ponctuée par un repas proposé par les organisateurs, nous avons eu un fameux dahl servi avec le vin vinifié au Couvent du Levat par l’association marseillaise de vinification vivante et urbaine Cuve. Et le matin, après une courte nuit, nous nous réveillons ensemble pour une dernière écoute et un petit déjeuner partagé.

Dans la tente « intendance » service d’un délicieux dahl cuisiné Gaëtan Parseihian de l’équipe deletere.

Mais participer au Soundcamp, c’est plus, évidemment. C’est un moment partagé à travers le monde. Plusieurs campements, une expérience commune. La proposition artistique du streaming, de l’écoute en direct, permet de créer un espace commun pour tous ceux qui écoutent, quel que soit l’endroit où ils sont. Et c’est ce partage qui transforme notre écoute, qui nous aide à nous concentrer, qui nous fait entendre des paysages sonores comme jamais nous ne les avions entendus. Les paysages sonores du monde entier se mêlent à celui qui nous entoure en un tout.

En début d’après-midi, moment de détente à l’écoute des oiseaux de Californie.

Se promener dans les jardins à travers les levers de Soleil du monde

Comme dans chaque Soundcamp, était diffusée en continu la pièce Réveil de Grant Smith, les fameuses 24 h de lever du soleil à travers le monde. Au Couvent, deletere nous a proposé plusieurs manières de l’écouter. Autour des tentes, on pouvait s’installer dans un transat et profiter d’une écoute en stéréo, une écoute enveloppante et méditative avec les autres. La façade de l’atelier de deletere a été transformé en support d’enceintes, une stéréo, comme une scène où se déroulait le paysage.

Ces écoutes classiques étaient complétées par une proposition de l’artiste Grégoire Lauvin, initiateur du Soundcamp de Marseille et membre de deletere : au fil de nos errances dans le jardin, on pouvait se faire surprendre par des points d’écoute cachés dans la flore. Avec ces Streambox, boîtes de streaming, les paysages sonores du monde entier venaient se confondre avec celui du couvent.

Fanny Jacob, étudiante à l’Ecole Supérieure d’Art Supérieure d’Aix-en-Provence, est en train d’installer des points d’écoute Streambox au fil du jardin.
Streambox cachée dans un buisson, au bord du sentier.

Des performances avec la faune de l’autre bout de la Terre

Tout au long des 24 h, plusieurs artistes ont proposé des performances en utilisant les flux streaming actifs sur la carte de Locus Sonus. Dans l’après-midi Erin Gee et Mitchell Hermann, artistes résidents de Locus Sonus, nous ont proposé une belle improvisation pour voix et ordinateur où la chanteuse entrait en dialogue avec les oiseaux de Californie en imitant leurs chants.

Erin Gee et Mitchell Hermann performent avec les chants d’oiseaux californiens, face au tentes et aux participants allongés dans l’herbe.
Discussion sur la performance entre Lucien Gaudion, artiste du laboratoire deletere, une chercheuse en art sonore et un danseur.

Le début de soirée a été habité par des oiseaux japonais lors d’une performance de Yasushi Sako. En direct par chat avec ses collègues de CyberForest, laboratoire de bioacoustique de l’université de Tokyo au Japon, ils nous ont donné à entendre et identifier des espèces nippones. Enfin, pour clôturer la soirée, Damien Sorrentino et Gaëtan Parseihian, de deletere, nous ont fait nous envoler avec leur performance musicale ornithologique. Ce sont aussi eux qui, malgré le mistral, nous ont éveillés au petit matin.

A la nuit tombante, performance audiovisuelle en temps réel de Yasushi Sako (Cyber Forest, Japon). On voit sur l’écran derrière lui le chat avec ses collègues de Cyber Forest, et les traductions du nom des oiseaux que l’on entend chanter.
Damien Sorrentino pendant sa performance musicale ornithologique avec Gaetan Parseihian.
Dernière écoute du monde avant de rejoindre nos tentes pour la nuit.

L’aube et le mistral

Malgré le mistral puissant qui nous a agités, nous avons passé la nuit dans nos tentes. Le réveil, un peu rude avec le peu d’heures de sommeil, a d’abord été musical et puis, très vite, le vent (à près de 130 km/h en rafales, ndlr) a eu raison de nous. Nous avons petit déjeuné bien au chaud et à l’abri, les oreilles et la tête encore pleines de chants d’oiseaux…

Makery reviendra prochainement sur le travail du laboratoire deletere.

Le site internet du programme Soundcamp.