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Romain Di Vozzo: «Bientôt un diplôme de fabmanager avec la Fab Academy»

Romain Di Vozzo, fondateur du Digiscope, le fablab de l'université Paris-Saclay. © Carine Claude

Un diplôme de fabmanager, un Fab Campus au cœur de Paris-Saclay… Romain Di Vozzo, coordinateur de FAB14, a multiplié les annonces à l’occasion de la conférence internationale des fablabs. Interview.

Les Fab Conferences sont propices aux annonces en tout genre et FAB14 n’échappe pas à la règle. Lors de son intervention pendant la conférence internationale des fablabs à Toulouse le 18 juillet, Romain Di Vozzo, fondateur du fablab Digiscope et coordinateur de FAB14, a dévoilé les contours du futur diplôme d’établissement (DE) de fabmanager, une formation hybride qui sera portée par la Fab Academy et l’université Paris-Saclay. Et la Fab Academy, Romain Di Vozzo connaît.

Cet ancien de l’Inria, désormais chef de projet fablab de l’université Paris-Saclay, a été le premier Français diplômé de la Fab Academy, ce programme d’apprentissage de la fabrication numérique « How to Make (Almost) Anything » conçu par Neil Gershenfeld au Center For Bits and Atoms du MIT. Pour Makery, à l’occasion du FAB14 distribué consacré à la recherche introduit par Neil Gershenfeld himself qui aura rassemblé près de 80 chercheurs et fabmanagers internationaux, il revient sur l’organisation de FAB14 et son volet distribué partout en France, ainsi que sur les projets qu’il mène à l’université.

Qu’est-ce que les FAB14 distribués ont apporté au réseau français des fablabs?

Clairement, les FAB14 distribués ont fait émerger des gens un peu partout sur le territoire. Je pense notamment à Joris Navarro du fablab Squaregolab à Perpignan qui vient de passer sa Fab Academy. Il est en train de suivre un chemin où il peut garantir à son fablab, à sa région et à une partie du national d’exister au-delà du territoire français. Mais l’organisation de FAB14 distribué nous amène aussi à nous poser des questions sur d’autres personnes et d’autres lieux engagés dans cette démarche distribuée, mais qui n’en respectent pas les termes.

C’est-à-dire?

Toute la question est de savoir pourquoi organiser un FAB distribué. Il y a eu quelques comportements qui ne correspondent pas à l’éthique qui a été définie lors d’OctoberMake en octobre 2017 (on apprendra lors du debrief de FAB distribué que les mauvais joueurs sont ceux de Cahors, qui devaient accueillir la thématique Energie, ndlr). L’objectif était de fédérer une communauté locale à un moment donné pour l’amener à rencontrer la communauté internationale des gens qui viennent à FAB14, pas juste de faire un coup politique dans son coin. Nous y reviendrons certainement en interne au niveau du réseau français des fablabs.

Quelle a été l’implication de la Fab Foundation dans l’organisation française de FAB14? N’y a-t-il pas eu un problème de coordination?

On a dû redresser le projet. Au début, il y a eu une incompréhension réelle sur ce qu’est une FABX (une Fab Conference, ndlr) de la part de certaines parties prenantes de FAB14. C’est pourquoi, pour les prochaines éditions, on va demander aux personnes qui se présentent d’avoir participé à au moins deux FABX et peut-être aussi de fournir des justificatifs sur leur santé financière. C’est essentiel, car ce type de méconnaissance ou de fragilité met tout le monde en péril, les gens, les structures, voire la FABX elle-même.

FAB14 s’est ouvert par un Fab City Summit. Une Fab City Foundation devrait voir le jour prochainement. Comment tous ces réseaux et toutes ces structures vont-elles coopérer?

Ça va être une mise à l’épreuve. Comment va t-on gérer la logique distribuée des réseaux de lieux où l’on manufacture et où l’on produit des choses à l’échelle d’une ville avec des inputs industriels forcément différents ? Par exemple, la Fab Foundation n’a pas de partenariat avec Ikea, mais le réseau Fab City, si. Je pense que cet élargissement permettra de s’adresser à l’ensemble des acteurs. C’est ce qu’on va essayer de faire ici à l’université Paris-Saclay avec la création du Fab Campus.

Un Fab Campus, qu’est-ce que c’est?

Sur le plateau de Saclay, nous avons une force : il existe déjà un réseau. Je pilote le groupe de travail des fablabs de l’université Paris-Saclay, un réseau constitué d’un fablab et de onze digital fabrication facilities réparties sur le site. Ici, j’aimerais faire éclore un Fab Campus qui serait à l’image d’une fabcity et de sa logique d’initiative. L’objectif serait de mobiliser des ressources pour la recherche, pour l’éducation, mais aussi de mener des expérimentations très concrètes comme, par exemple, la gestion des déchets, ce qui n’est pas rien sur un site qui est en permanence en travaux.

Dans l’idéal, j’aimerais le faire sur l’ensemble du plateau de Saclay, mais cela soulèverait d’autres problématiques, sachant qu’il s’étend sur trente-sept communes… Avant tout, il s’agit de demander au réseau Fab City un cahier des charges et une feuille de route. Je me suis adressé à plusieurs interlocuteurs, mais pour le moment, ces documents n’existent pas. Je ferai tout pour faire entrer l’université Paris-Saclay et éventuellement le territoire dans cette logique Fab Campus. Mais je ne le ferai que si j’ai une feuille de route. Je n’engagerai pas mon université sans ça.

L’équipe d’organisation de FAB14 à Toulouse (avec Romain Di Vozzo au téléphone). © Makery

Vous avez annoncé le lancement d’une formation hybride entre l’université Paris-Saclay et la Fab Academy. Pouvez-vous nous en dire plus?

Cela fait bien trois ans que j’y travaille. C’est en effet à partir de janvier que cette formation très ouverte commencera, il s’agit d’un diplôme d’établissement (DE) fabmanager qui comporte la formation délivrée par la Fab Academy et quatre modules de cours en plus (propriété intellectuelle, design, philosophie du design, interaction homme-machine). Elle fonctionnera de la même façon que la Fab Academy, sur candidature, mais coûtera plus cher. Parce qu’il faudra bien payer les enseignants comme la salle qui sera dédiée aux étudiants. Un peu comme dans une école d’art, ils auront leur table comme s’ils avaient un bout de fablab pour eux. Le nom n’est pas encore arrêté, j’aurais voulu qu’on l’appelle Fabac+UPSaclay (ce qui aurait permis de le décliner ailleurs). Pour l’instant, l’université n’en veut pas. Ce DE fabmanager ne rend pas forcément hommage au niveau de formation mais il est accessible aux candidats sans formation universitaire. Ils seront cinq ou six en janvier pour la première année, qui pourront ainsi bénéficier des avantages du statut d’étudiant (bourses, résidences universitaires, etc.).

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