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La nuit, je rêve en céramique

Gros plan sur un rêve en céramique, extrait du projet «Sparkling Matter» de Matteo Nasini. © DR

Avec le projet «Sparkling Matter», dont les céramiques imprimées en 3D sont exposées dans «La belle vie numérique» à Paris, l’artiste italien Matteo Nasini modélise nos rêves.

Au premier étage de la fondation EDF, rue Récamier à Paris, les sculptures en céramique 3D de l’artiste italien Matteo Nasini attirent immanquablement l’œil. Présentées dans le cadre de l’exposition La belle vie numérique, leurs formes évasives suggèrent une matérialité rêveuse qui s’accorde parfaitement au projet.

Ceci est un rêve…

Ces sculptures font partie de la série en cours Sparkling Matter, exploration formelle et informelle du sommeil et des rêves. L’artiste sonore Matteo Nasini est parti d’une expérience performée dans des galeries italiennes depuis 2016 et à la Biennale de Venise 2017 : un homme dort, ses ondes cérébrales sont converties en sons puis restituées en temps réel dans un environnement audio immersif.

Extrait du «concert de sommeil Sparkling Matter», Matteo Nasini, 7 avril 2016:

Le son des rêves

« Durant la performance, le dormeur porte un casque EEG avec seize aimants qui transmettent les ondes cérébrales à mon ordinateur sous forme d’électroencéphalogramme, explique Matteo Nasini. Ces datas sont interprétées via une interface composée de seize canaux qui créent chacun une onde sonore. La composition suit les hauts et les bas de l’activité du cerveau et alterne des sonorités monotimbrales et multitimbrales alignées sur les seize timbres correspondant aux seize aimants. »

Ne croyez pas que cette sleeping session – où une certaine partie du public, couverture à l’appui, accompagne le dormeur dans son sommeil en écoutant ce son des rêves – soit propice à l’oisiveté. Le sommeil d’un dormeur n’est pas toujours léger. « Pendant le sommeil, le cerveau a une activité variable et je dois donc garder un œil sur l’EEG pour accorder les sources des canaux, précise Nasini. Quand vient le sommeil paradoxal, l’activité s’accélère, l’EEG devient fou et la musique suit à tel point que je dois baisser le volume ! »

Une déco de rêves

Matteo Nasini a voulu matérialiser ces sources sonores sous la forme de sculptures 3D en céramique. « Sans être le cœur de Sparkling Matter, qui est essentiellement musical, ces sculptures en sont un aspect fondamental. Ce ne sont pas des “objets” décoratifs, mais des “rêves” décoratifs, avertit-il. Leur forme est la conséquence directe des ondes cérébrales du performeur. Elles m’ont aussi intéressé par la relation qu’elles induisaient entre deux process : le travail produit par un esprit humain (la composition musicale en l’occurrence), et le travail produit par une machine, l’imprimante 3D. »

Conception des céramiques 3D modélisées depuis les ondes cérébrales captées pendant le sommeil des performeurs de «Sparkling Matter». © DR

Une sorte de boucle de modélisation, depuis celle de l’EEG jusqu’à celle de l’impression 3D. « Pour la réalisation des sculptures, j’ai travaillé avec des spécialistes comme Nicola Miele, pour l’impression 3D des ondes cérébrales, et Ruggero Carlesso, un artisan céramiste réputé. L’imprimante 3D a conçu une première sculpture provisoire qui a pu être ensuite placée dans un four à céramique et émaillée. » Ces traces de rêves en céramique sont à voir jusqu’au 18 mars à Paris.

«Sparkling Matter», dans l’exposition «La belle vie numérique», Espace fondation EDF, 6 rue Récamier, Paris 7ème, jusqu’au 18 mars, entrée libre