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Au cœur du lave-linge qui voulait déprogrammer son obsolescence

Avant d'être Increvable, le lave-linge éthique va devoir naître (capture écran). © DR

L’Increvable est un concept de lave-linge qui combat la tendance des objets à se détraquer pour être remplacés. Plébiscité par la presse, ce projet de design industriel a toutefois une longue route avant de prendre forme. 

Un lave-linge conçu pour vous accompagner pour au moins 50 ans, l’idée est séduisante. Montable en kit, L’Increvable peut tout aussi bien être démonté en quelques coups de tournevis. Comme alternative au lestage habituel en béton, un système innovant de ballast d’eau permet de le rendre léger au transport. Et son logiciel de commande peut être mis à jour en le connectant à un ordinateur.

Bref, l’arme fatale contre l’obsolescence programmée qui voit un lave-linge classique rejoindre le cimetière de l’électroménager au bout de 10 ans en moyenne. Son seul défaut ? Ce lave-linge n’existe pas encore.

Un lave-linge livrable en kit. © DR

Son concepteur, Julien Phedyaeff, l’a imaginé au sortir de ses études de design à l’Ensci (Ecole nationale supérieure de création industrielle) en 2014. Son projet a été repéré par l’Agence pour la promotion de la création industrielle. Julien Phedyaeff, depuis rejoint par Christopher Santerre, designer produit, voudrait qu’ils deviennent des agents de disruption du marché en proposant des solutions éthiques et durables. Notamment en se donnant les moyens de faire exister L’Increvable.

Christopher Santerre, alors stagiaire, a été marqué par cette remarque d’un designer : « Du moment que le produit finit dans les mains de l’utilisateur, notre contrat est rempli. Après, qu’il dure ou pas, ce n’est pas notre problème. » Conscient des logiques de l’obsolescence programmée en tant que consommateur, c’était la première fois que Christopher le vivait en tant qu’acteur de l’industrie. « J’estime que la responsabilité du designer va au-delà d’une simple logique de séduction pour faire acheter », dit Julien Phedyaeff.

L’usure cosmétique ou encore stylistique est traitée par un habillage frontal amovible. © DR

Pour se financer, les jeunes designers n’ont pas choisi la voie initiale du financement participatif. Avant même qu’un prototype ne soit mis au point, L’Increvable a déjà bénéficié d’une large communication comme solution exemplaire à l’obsolescence programmée. Mais les deux concepteurs ne souhaitent pas que la vie virtuelle de la machine entache les objectifs du projet. L’Increvable embarque des innovations qu’il va falloir valider sur le terrain de l’ingénierie. Julien et Christopher estiment la création d’un prototype industriel à 100 000 euros. 

Leur site annonçait qu’ils allaient réunir la somme d’amorçage d’ici décembre. Christopher révise le calendrier : « Nous avons des pistes sérieuses qui nous permettraient d’atteindre au moins la moitié de notre objectif d’ici la fin de l’année. » Le parcours est encore semé d’embûches : L’Increvable était en lice pour le James Dyson Awards 2014, mais n’a finalement pas été retenu. Beaux joueurs, ils s’en amusent: « James, tu as toujours notre mail ! ». 

Les deux designers ont décidé d’intégrer des orientations économiques plus durables dans la conception du prototype : « L’idée est de diminuer au maximum nos besoins en capitaux fixes, c’est-à-dire les lignes de production nécessaires à la fabrication de la machine. » Ils ont donc repensé les étapes de l’architecture d’une machine traditionnelle, en explorant d’autres principes constructifs que la tôlerie emboutie. Enfin, « l’un des points clé du projet est l’assemblage. Il devra se faire sans outillage lourd, pour réaliser là aussi des économies ». 

Une campagne de crowdfunding est prévue en 2017 pour financer la production. Pour le montant appelé cependant, « sans prototype, nous ne sommes pas en mesure d’évaluer le coût de revient d’une première série d’Increvables ».

La vidéo de présentation de L’Increvable :

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