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Les hackers à la rencontre du grand public au THSF de Toulouse

Les hackers du THSF ont ouvert leur hangar pour accueillir le grand public. © Carine Claude

Un grand mix de geekeries et d’expériences grand public, c’était le programme de la 6ème édition du THSF, le festival toulousain du collectif d’artistes Mix’art Myrys et du hackerspace Tetalab, du 14 au 17 mai à Toulouse.  

Toulouse, envoyée spéciale

Un public singulier s’est donné rendez-vous au THSF. Le Toulouse Hacker Space Factory, festival de hack toulousain qui joue l’hybridation des genres depuis six ans déjà, accueillait du 14 au 17 mai artistes, hackers, penseurs, bidouilleurs et geeks avertis, mais aussi seniors curieux et riverains matinaux pas effarouchés par les teufeurs de la veille jouant les prolongations jusqu’à midi.

« L’ambiance est décontractée, on n’y connaît pas grand chose, mais ça change des sorties habituelles », explique un couple accompagné de leurs deux enfants déjà accrochés au joystick d’une borne Atari.

Un festival dans un hangar… pour un public varié au rendez-vous du THSF. © Carine Claude

Sous le hangar de 4.000 m2 du collectif d’artistes Mix’art Myrys se sont enchaînés quatre jours de performances, installations, rétrogaming, conférences, concerts et ateliers de bidouille, y compris en langue des signes. Avec un franc succès pour l’initiation Arduino, la sérigraphie DiY, ou encore le crochetage de serrures. Car il s’agit pour les organisateurs d’inciter le public à une moindre passivité face aux technologies et d’en mesurer les enjeux, comme la protection des données personnelles sur Internet.

Un peu de détente entre deux conférences, avec une partie de ping-pong digital. © Carine Claude
Le Labomedia d’Orléans avait apporté ses vieux Minitel, pour revisiter leur côté «rose». © Carine Claude

« Les hackers ne sont pas là pour faire de la médiation. Ce qui nous intéresse, c’est de savoir comment transformer l’information en connaissance », explique Pierre, membre du comité d’organisation de la THSF depuis trois ans (les hackers toulousains tiennent à leur anonymat). « On ne peut pas simplement interroger les objets pour leur valeur technologique, ajoute-t-il, notre démarche implique une certaine réflexivité, c’est à dire comprendre la transformation des représentations et des savoirs, la manière dont se forment les jugements, les mutations politiques et sociales. »

«Cybulture», robot de l’artiste Thierry Lacroix, accueillait le public des ateliers DiY. © Carine Claude

Pas surprenant alors de retrouver en ouverture de festival la théoricienne du mouvement néo-luddite français Célia Izoard et son discours ouvertement technocritique, et le philosophe Bernard Stiegler, venu présenter une expérimentation territoriale basée sur l’économie contributive en région parisienne.

Rien ne vaut une séance de «Body Buddhism» pour méditer sur l’ordinateur quantique. © Carine Claude

Dense, le programme des conférences a volontairement brassé large, des droits et des libertés sur Internet avec Jérémie Zimmermann, cofondateur de la Quadrature du Net en passant par des séquences pointues comme celle sur l’ordinateur quantique et son impact sur la cryptographie, « ardue d’accès » de l’aveu même d’un membre de l’organisation.

La conférence de Jérémie Zimmermann au THSF 2015 :

A l’invitation du collectif, l’hacktiviste espagnol Lord Epsylon est venu présenter Border Check, une extension de navigateur qui trace et géolocalise les serveurs relais par cartographie, histoire de révéler les réalités politiques et physiques qui se cachent derrière Internet.

Photomaton sous Raspberry Pi2 de PauLLA et du MIPS Lab de Pau. © Carine Claude

« Cette année, on a vraiment voulu étoffer le programme des conférences. Comme les choses s’organisent de manière collective, cela peut prendre pas mal de temps pour se caler », admet Pierre. Le collectif Mix’art Myrys et le hackerspace Tetalab, co-organisateurs du festival, misent sur l’autogestion et les pratiques croisées. Avec environ 30.000 € de budget, l’événement est passé de deux à quatre jours, entre autres pour faciliter l’accueil des artistes et des collectifs « en mini-résidence » comme le Labomédia d’Orléans ou RYbN.

Le collectif Mix’art Myrys est installé depuis 10 ans sous ce hangar près du canal du Midi. © Carine Claude

« On reçoit quelques subventions, mais l’objectif est de rester le plus indépendant possible », explique un membre du Tetalab qui préfère rester anonyme. « Surtout avec le changement de municipalité, on se sait pas trop comment les choses vont tourner pour nous à l’avenir, on reste vigilants. »

Le site du THSF 2015