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«DIYsect», le webdoc sur la route de l’éthique biotech

Ben Welmond, réalisateur, et Mary Tsang, bio-artiste, en plein montage de «DiYSect», une série webdoc sur la biologie DiY aux Etats-Unis. © DR

Makery a rencontré à Los Angeles Mary Tsang et Ben Welmond, en finition de montage  de «DIYsect», un webdoc qui veut rapprocher bio-artistes et bio-hackers. Le premier épisode est en ligne depuis le 19 septembre.

Los Angeles, correspondance

Mary Tsang et Ben Welmond sont deux jeunes artistes complémentaires : Mary Tsang est originaire de Los Angeles et a étudié la biologie et l’art alors que Ben Welmond est originaire de la région de Washington DC et officie comme réalisateur et vidéaste. Les deux se rencontrent à l’Université Carnegie-Mellon à Pittsburgh et décident de mettre en commun leur savoir-faire pour réaliser un webdoc. À l’été 2013 ils parviennent à financer DIYsect via la plateforme Kickstarter et embarquent alors pour un grand tour des États-Unis à la rencontre de biohackers, bioartistes, biologistes synthétiques, auteurs et experts.

Pour financer la réalisation de «DIYsect», Ben et Mary ont documenté leur projet sur Kiskstarter. © DR

Le résultat est une belle web-série qui dresse l’état des lieux du domaine aux Etats-Unis.

DIYsect, Mary Tsang et Ben Welmond, bande-annonce:

DIYsect ouvre la discussion sur ce constat : la biotechnologie est de plus en plus présente dans notre société et avec les avancées de la biologie synthétique, il ne sera pas long avant que nous puissions facilement concevoir et construire nos propres organismes. Les scientifiques prédisent la médecine personnalisée, les énergies alternatives produites par des bactéries, et la résorption de la faim dans le monde grâce au bétail transgénique… Cependant, bon nombre de ces innovations sont concentrées dans certains milieux sociaux et/ou académiques, et la recherche est influencée par l’industrie qui la finance.

« Notre objectif est de permettre au public de se rendre compte que cette biotechnologie va déterminer beaucoup de ce qui constituera notre société dans le futur : la nourriture, la façon dont les maladies sont traitées, et qui y aura accès. Il n’est pas facile pour les néophytes de comprendre tous ces enjeux, nous voulons expliquer les choses clairement et synthétiquement. Il y a tellement de technologies qui nous affectent, je ne suis pas biologiste mais je voulais réaliser un documentaire qui éduque les personnes sur ce sujet en particulier », raconte Ben Welmond.

« Nous souhaitons offrir des connaissances au public pour les aider à dépasser leurs craintes et rejoindre le débat sur ces nouvelles technologies. » Mary Tsang

Selon Tsang et Welmond, la communauté des biologistes DIY et des biohackers aux Etats-Unis est un conglomérat de personnes issues de la culture maker, de participants au concours iGEM (International Genetically Engineered Machine Foundation) ou d’activistes de l’éthique hacker qui encouragent à déconstruire les choses pour les comprendre et à décentraliser les connaissances au bénéfice de tous.

Capture écran de «DIYsect», webdoc à voir en ligne cet automne. © DR

« Nous sommes allés à la rencontre de personnes clé, comme Ellen Jorgensen et Nurit Bar-Shai, qui ont cofondé en 2009 le Genspace Community Lab de New York. Nombre de biolabs communautaires ont ouvert ces dernières années, et on constate des orientations très diverses », dit Mary Tsang, qui ne tarit pas d’éloges sur la dernière rencontre du réseau Hackteria au printemps, en Indonésie : « Participer à Hackteria a vraiment été un tournant pour moi. Revenir sur Los Angeles pour travailler au film a été un peu difficile. J’aimerais que les labs DIY soient plus proches des artistes. Nous avons tellement apprécié de rencontrer des personnes comme Steve Kurtz ! » Welmond ajoute : « La démarche d’analyse politique est importante et en cela, notre mentor a été Richard Pell, qui dirige le Center for Post Natural History et fut notre professeur à Carnegie Mellon. »

DIYsect, épisode 1: «Learning in Public» (sept. 2014):

À la question de savoir où se situe leur documentaire, Mary Tsang répond : « Nous essayons de créer un dialogue entre bio hackers et bio artistes. Nous pensons que de par leur position les artistes sont en mesure de problématiser l’avenir de la science et de confronter la norme. Ils re-contextualisent le bio-laboratoire. On est loin de la dimension start-up de la biologie synthétique. »

Au fil des épisodes, on peut retrouver quelques figures artistiques qui ont soulevé les problématiques éthiques des vingt dernières années, comme Steve Kurtz du Critical Art Ensemble (accusé à tort de bioterrorisme en 2004), les artistes pionniers du domaine Joe Davis ou Eduardo Kac (le lapin fluo), l’artiste provocateur et savant fou Adam Zaretsky, la critique d’art Claire Pentecost, et bien d’autres. La série docu-web est divisée en cinq épisodes thématiques d’une dizaine de minutes chacun : DIY et amateurisme public, «génocratie (gènes, identité et autorité)», bioterrorisme, pratiques hybrides, etc.

À visionner tout au long de l’automne sur diysect.com.